Partager sa passion, ça s'apprend !

Ils n’ont pas plus de 25 ans et sont déjà de brillants musiciens et musiciennes. Pendant trois semaines au sein de l’Orchestre français des jeunes, ils apprennent à communiquer au public leur passion pour la musique. Reportage

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“Une vraie décharge de bonheur, de musique et de rencontres !” Voilà comment Yann Maratka décrit son expérience à l’Orchestre Français des Jeunes. Ce jeune et brillant clarinettiste de 19 ans y faisait cette année sa première session d’été.

Depuis 1982, l’Orchestre Français des Jeunes forme les futurs professionnels au métier de musicien d’orchestre, sous la houlette de professeurs choisis parmi les grands orchestres français et d’un chef de renom, Michael Schønwandt. Durant les trois semaines que dure ce stage grandeur nature, les jeunes gens se préparent aux exigences et au rythme de travail qui les attendent dans leur carrière à venir.

Sélectionnés parmi les conservatoires supérieurs de musique de Paris et Lyon, mais aussi les pôles d’enseignement supérieur de notre territoire, ces musiciens futurs professionnels ont tous entre 18 et 25 ans. Ayant déjà bénéficié d’une formation initiale de haut niveau, ils jouent déjà tous merveilleusement bien de leur instrument. Reste à leur permettre de s'exprimer dans un cadre qui soit à la hauteur de leur talent.

Une expérience mémorable

“Le grand bénéfice de l’OFJ, pour nous aspirants professionnels, est de vivre pendant trois semaines dans la peau d’un musicien d’orchestre. C’est très riche musicalement, et humainement. "

Yan Malatka

Et on le comprend ! Depuis ses débuts, l’OFJ s’attache à offrir à ses membres une aventure musicale rare : le travail autour d’un programme musical dans une grande salle de concert française, suivi d’une tournée d’une semaine pour présenter leur travail. Car l’OFJ est bel et bien un orchestre. Pour l’édition 2022 de sa session d’été, les jeunes avaient rendez-vous à Lille pour des répétitions au conservatoire ainsi que dans la magnifique salle du Nouveau Siècle. Ils y étaient dirigés par le chef danois Michael Schønwandt, directeur musical de l’Orchestre National de Montpellier Languedoc-Roussillon. Une fois leur travail achevé, ils se sont envolés vers la Roumanie pour une tournée de 10 jours dans tout le pays. “C’est sacrément intense, surtout avec la semaine de médiation et musique de chambre avant la tournée. Mais ça vaut le coup ! ”

En effet, avant de commencer le travail d’orchestre, ceux qui en faisaient la demande avaient la possibilité de participer au module complémentaire de musique de chambre. Une semaine de travail avec des musiciens spécialistes du domaine qui aboutit à des concerts dans toute la métropole lilloise, ouverts à tous les publics. Et pour que ces concerts soient accessibles au plus grand nombre, l’OFJ a, depuis quelques années, ajouté un module de médiation à cette semaine de formation.

La médiation au service de la musique…

La médiation, l’art de bien communiquer la musique au plus grand nombre, fait depuis longtemps partie de l’offre de formation de l’OFJ. Nouveauté cette année : la formation était assurée par des musiciens professionnels de cette démarche : l’association Les Caprices de Marianne, basée à Bordeaux. Ce collectif de musiciens est convaincu que la médiation est une perspective d’avenir stimulante pour les futurs professionnels.

“Cet art nécessaire de la prise de parole pendant le concert, pour expliquer les œuvres jouées, est en train de rentrer dans les habitudes des musiciens professionnels. Et c’est une bonne chose ! Mais il faut savoir raconter la musique sans la trahir, sans rien lui enlever de sa force. La médiation ne doit pas être une édulcoration, mais une amélioration de l’expérience du concert.”

La fondatrice, la violoncelliste Marianne Muglioni

Invitée à venir s'exprimer devant les stagiaires, en ouverture de semaine, Marianne Muglioni a insisté sur la nécessité pour les musiciens professionnels d’aller à la rencontre de nouveaux publics : “Il s’agit “d’aller vers”, non pas pour remplir les salles de concert, mais pour partager notre expression artistique avec le plus grand nombre. Et pour ça, rien ne remplace la parole d’un musicien. Nous devons donc apprendre.”

…et pas l’inverse !

À la base de la motivation qui pousse les jeunes à s’inscrire, il doit donc y avoir une passion pour le partage. “J’ai toujours adoré parler de musique, parce que c’est ma passion ! J’en parle un peu tout le temps, à mes amis non-musiciens, à mes parents : avec la médiation telle que l’OFJ nous le propose, je peux le faire avec tout le monde”, explique Yan Maratka. 

À l’aide de modèles du genre, comme les présentations radiophoniques de Frédéric Lodéon, les participants au module de médiation ont pu exercer leur art de la prise de parole pendant une semaine. Le but étant de préparer leur concert de musique de chambre du week-end. “L’intérêt de se baser sur les modèles de Frédéric Lodéon, c’est qu’il est un grand musicien, avant d’être un grand pédagogue, insiste Olivier Delaunay, médiateur et formateur aux Caprices de Marianne. C’est le modèle que nous voulons pour la médiation de demain : des musiciens qui parlent de musique, et qui le font avec toute la passion qui les anime”,

Yan Maratka insiste sur ce positionnement nouveau du musicien, à cheval entre l’excellence musicale et la performance scénique :  “La vraie plus-value de cette semaine était qu’on ne nous considérait pas comme des comédiens. Nous avons appris qu’en tant que musicien, nous avons déjà beaucoup de choses intéressantes à dire ! En nous plongeant en profondeur dans les œuvres, nous avons appris beaucoup de choses, qui ont d’ailleurs nourri notre interprétation. J’ai personnellement changé ma façon de jouer en réfléchissant à ce que pouvait représenter cette musique, pour moi et pour les autres. ” Tout l’avenir de la médiation est là, dans l’union entre la magie du concert et le plaisir de la transmission.

Retour en vidéo sur les sessions d'été 2022 avec Michael Schønwandt